lundi 29 octobre 2007

Elle est ma quatrième dimension

Pour niveler vers le haut les montagnes russes de mon moral je branche cinq heures par jour deux écouteurs dans mes oreilles. Chez moi, dans la rue, à pied ou à vélo, et devant mon ordinateur. Tant pis si je travaille un peu moins vite car j’utilise une petite partie de mon cerveau pour transformer ces décibels en un ruisseau continu de chocolat qui fond dans la bouche ; il y a en arrière plan de mon quotidien un petit air de fête qui dure et durera longtemps encore.

La plupart du temps je me contente d’arpenter mon jardin secret qui avec le temps est devenu vaste et coloré par des fleurs du monde entier. J’ouvre au hasard les tiroirs de ma grande commode magique et les joies d’alors, les souvenirs qui y sont attachés, tous reviennent comme au premier jour. Je me repose sereinement dans ma bulle de bonheur portable qui me garantit que dans un goulag au fond de la Sibérie avec un baladeur mp3 je pourrais presque apprendre à manger de la neige et à aimer ça.
Certains jours j’ai l’humeur curieuse et je pars à la découverte des quelques gigas de mon disque dur externe que je n’ai pas encore explorés. En terrain inconnu j’avance attentif, en courant quand c’est trop facile, en tâtonnant quand c’est obscur, je goûte du bout des lèvres, et parfois je bois tout d’un coup et me ressers cinq fois parce que je viens de trouver une nouvelle perle dans ma mine d’or. Mon trésor vient de s’agrandir, je me sens plus riche et je suis heureux.

Il y a les trois rifs de guitare qui m’arrachent des larmes de bonheur, une voix pure et cinq trompettes claires comme de l’eau de roche qui s’accrochent très haut dans l’âme et font entrer tout mon être dans un état de résonance émotionnel ; le bonheur est simple et purement physique, mais d’une profondeur qui rivalise avec l’orgasme d’amour car demain encore il sera presque aussi fort.
Il y a cette voie étrange que j’ai fini par apprivoiser, il y a la complexité des dizaines d’instruments qui jouent en même temps ; ces sons en première lecture un peu dissonants, cette touffue multitude dépassent ma capacité d’entendement, mais le plaisir la transcende car l’harmonie est là, incompréhensible, incontestable et tellement jouissive.

Tous les soirs avant de quitter Rokaz je choisis mon tube du jour pour rentrer avec à vélo. C’est souvent le meilleur moment de la journée. Je glisse rapidement dans la ville déserte avec du bonheur dans les oreilles, et tous les jours j’ai l’impression de battre mon record de vitesse de la veille. En arrivant chez moi, quand Zéca et Marcelo ne sont pas là, je danse une demi-heure dans mon salon sur les mêmes rythmes entraînants, et alors, quels qu’aient été les événements de la journée, la vie est belle.

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